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[Interview] Les grands enjeux de la filière photovoltaïque : agrivoltaïsme, réemploi et recyclage – Sébastien Appy
Dans cette série d’interviews “Les grands enjeux de la filière photovoltaïque“, des acteurs majeurs de la filière sont mis à l’honneur. Ceux-ci participent à rendre le cycle de vie des panneaux solaires photovoltaïques le plus vertueux possible.
Directeur Opérationnel de Valeco, Sébastien Appy, nous éclaire sur le développement de l’agrivoltaïsme et le déroulement d’un chantier réalisé avec Soren.
Pouvez-vous présenter Valeco ?
Sébastien Appy : Valeco est un producteur d’énergies renouvelables qui exploite 845 MW (soit l’équivalent de la consommation annuelle électrique de plus de 678 330 personnes). L’entreprise a été fondée il y a près de 30 ans et compte aujourd’hui 280 employés répartis dans une dizaine d’agences. Le siège est situé à Montpellier… là où il y a du vent et du soleil !
Les projets de parcs éoliens terrestres et en mer représentent aujourd’hui les trois-quarts de notre activité mais le photovoltaïque monte en puissance. Depuis le discours d’Emmanuel Macron à Belfort, le solaire est en train d’exploser [lors de son déplacement à Belfort le 10 février 2022, le Président Emmanuel Macron avait fixé l’objectif de 100 GW de solaire d’ici à 2050 soit une multiplication par près de dix fois la puissance installée]. D’ailleurs, c’est une évolution que l’on constate dans les pays voisins : Allemagne, Italie, Espagne …
Vous proposez des solutions d’agrivoltaïsme. Pouvez-vous en expliquer le principe ?
S.A : L’agrivoltaïsme vise à créer une synergie entre une production agricole et une production d’énergie photovoltaïque, coexistant sur une même surface foncière dans l’intérêt des agriculteurs et du territoire.
Aujourd’hui, il y a beaucoup d’acteurs qui proposent des projets d’agrivoltaïsme et il devient nécessaire d’encadrer juridiquement l’agrivoltaïsme. Cette notion doit d’ailleurs être définie dans un décret d’application de la loi du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergie renouvelable [le projet de décret encadrant le développement de l’agrivoltaïsme et des installations photovoltaïques sur terrains agricoles et forestiers a été mis en consultation du 26 décembre 2023 au 16 janvier 2024].
Quels sont les avantages de l’agrivoltaïsme ?
S.A : Lorsque l’on parle du développement de la filière photovoltaïque, on se heurte rapidement aux enjeux de surface et de foncier. Avec l’installation des parcs photovoltaïques sur des surfaces non utilisées (toitures, parking), l’agrivoltaïsme est l’une des solutions pour augmenter la production d’énergie solaire sans toucher aux zones naturelles. Aujourd’hui, en utilisant moins de 1% de la surface agricole française, nous arriverons à atteindre les objectifs du photovoltaïque. A titre de comparaison, les biocarburants utilisent déjà 5% des surfaces agricoles.
Travailler sur des projets d’agrivoltaïsme a fait évoluer notre manière de travailler puisque nous nous intéressons aux méthodes de travail et aux projets à long terme des agriculteurs. Ces points sont essentiels pour que les agriculteurs puissent travailler de la même manière, sans perte de rendement. Pour cela, Valeco a embauché des agronomes. Nous faisons attention à ce que les surfaces agricoles soient préservées grâce à une implantation en hauteur des panneaux solaires. Cela est aussi bénéfique pour le bien-être animal (par ex : les brebis peuvent s’y reposer à l’ombre) que pour le terrain (ex : la prairie est protégée des extrêmes climatiques).
Vous avez sollicité Soren pour l’évacuation de panneaux suite au démantèlement de la centrale de Sycala (34 000 PV – plus de 700 tonnes). Comment s’est déroulé le chantier ?
S.A : Nous avons sollicité Soren en septembre 2023 pour la centrale Solaire du SYCALA, située à Cahors (46). C’est un projet de grande envergure où plus de 60 000 modules ont été installés. Cette centrale existe depuis 2011 mais les modules photovoltaïques avaient des défauts (la feuille de plastique était abîmée). Les modules ont été collectés puis recyclés par Soren. Au total, nous avons changé près de 10 megawatts en l’espace de 2 mois.
Selon vous, quels sont les grands enjeux de la filière photovoltaïque pour 2024 ?
S.A : Je vois trois enjeux majeurs. Le premier est celui de la sensibilisation : la question du recyclage des modules est LA première question que pose le grand public.
Il va y avoir également un fort enjeu en termes de volumes à traiter dans les prochaines années. De nombreux modules vont arriver en fin de vie d’ici 2030 et il faudra démanteler les centrales puis recycler les modules.
Enfin, il y a un vrai enjeu de recrutement de main d’œuvre opérationnelle. Ma principale préoccupation est de savoir comment faire pour trouver du monde pour concevoir et développer nos projets. C’est un secteur porteur d’emploi !